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Au-delà de livrer : bâtir l’Internet à Iqaluit

Les améliorations apportées à la vitesse, à la qualité et à la sécurité d'Internet pourraient être plus importantes et plus concrètes pour la population en général que dans toute autre communauté où nous avons travaillé sur des PEI auparavant.
Par Jacques Latour
Dirigeant principal des technologies

Les améliorations apportées à la vitesse, à la qualité et à la sécurité d’Internet pourraient être plus importantes et plus concrètes pour la population en général que dans toute autre communauté où nous avons travaillé sur des PEI auparavant.

Depuis les dernières années, j’ai été impliqué dans la mise en place des Points d’échange Internet de plusieurs villes, de Vancouver à Charlottetown. Dans chaque projet, j’ai travaillé avec des parties prenantes telles que des FSI, des fournisseurs de contenu et des experts techniques locaux qui cherchaient à rendre leur Internet local plus performant et résilient. Aucune de ces initiatives ne m’avait préparé à ma plus récente visite à Iqaluit visant à démarrer les discussions au sujet de l’implantation d’un point d’échange Internet (PEI) dans cette communauté. 

Je pense qu’il est juste de dire que se plaindre de son fournisseur d’accès Internet est presque un sport national au Canada. Mais les résidents du Nunavut ont vraiment mérité ce droit.

Comme je l’ai écrit la semaine dernière, la vitesse et la performance d’Internet à Iqaluit sont incompréhensibles pour la plupart des Canadiens. Ainsi, les améliorations apportées à la vitesse, à la qualité et à la sécurité d’Internet pourraient être plus importantes et plus concrètes pour la population en général que dans toute autre communauté où nous avons travaillé sur des PEI auparavant.

Par conséquent, c’est sans surprise que notre première séance d’information et nos réunions suivantes avec les parties prenantes de la communauté ont connu un immense succès.

Alors pourquoi l’Internet est-il si mauvais à Iqaluit ?

Au printemps, j’ai écrit un article de blogue sur le fonctionnement d’un PEI dans une communauté connectée exclusivement par satellite et j’ai reçu de bons commentaires des lecteurs. Depuis, nous avons peaufiné l’implantation technique et, après quelques discussions avec les parties prenantes la semaine dernière, nous avons une bonne idée de la solution.

Voici comment nous avons décrit l’Internet d’Iqualuit (ou son absence) à la communauté la semaine dernière :

 

Pour aller droit au but : il n’y a pas d’Internet à Iqaluit. Il n’y a pas de réseaux interconnectés, ce qui signifie que chaque fois que quelqu’un a besoin d’accéder à Internet, même localement, le trafic doit accéder au satellite, obtenir les informations et les renvoyer. Cela coûte cher et est inefficace.

J’ai utilisé une analogie avec le système routier pour décrire la situation aux résidents locaux et aux parties prenantes.

 

Imaginez que pour vous rendre de votre maison au travail, vous deviez prendre un pont d’Iqaluit au continent, changer de routes, puis y retourner. Il n’y a pas de doute que cela ne fait aucun sens et personne ne concevrait une telle route. Pourtant, c’est ainsi que l’infrastructure Internet a été développée.

Ainsi, la solution consiste à implanter un PEI qui permettra l’échange de trafic localement, comme un rond-point VERS la communauté, et de livrer du contenu DANS la communauté.

 

 

Faire du PEI une réalité

La solution semble évidente, mais elle est tout de même complexe.

  1. Le PEI requiert de l’hébergement.

L’un des problèmes est que pour qu’il existe, un point d’échange doit être hébergé dans un centre de données indépendant du fournisseur. Aucune installation de ce type n’existe à Iqaluit. La Nuvujaq Society cherche à combler cette lacune en faisant appel à un centre de données qui hébergera le PEI d’Iqaluit.

Le centre de données offrira aussi de l’espace aux principaux réseaux de distribution de contenu et aux fournisseurs de contenus pour partager leur contenu localement.

Alors, que signifie tout cela ?

Cela signifie qu’il serait possible d’accéder localement à d’importants correctifs de sécurité ou mises à jour de système d’exploitation d’Apple, Android et Microsoft, sans que 8 000 résidents s’embourbent à essayer de mettre à jour leur iPhone iOS par satellite (la plupart du temps sans succès tout en étant facturé pour chaque tentative). Cela signifie que les résidents pourraient diffuser du contenu à grande vitesse à partir de leurs médias locaux. Cela signifie que par mauvais temps, un travailleur pourrait travailler de chez lui, en utilisant un RPV pour se connecter au bureau. 

  1. Les problèmes de réseau local doivent être résolus

Étant donné que l’infrastructure locale n’a pas été conçue en gardant à l’esprit l’interconnexion, il faudra surmonter certains obstacles à la vitesse. Il existe quelques options — y compris l’installation de la fibre dans la ville, ce qui serait facilement réalisable compte tenu de sa petite taille et de sa vaste infrastructure de poteaux.

  1. Bâtir la communauté PEI locale

Le succès d’un PEI dépend de la force de la communauté qui le soutient. L’un des éléments les plus positifs de nos réunions à Iqaluit était le désir des parties prenantes de s’impliquer dans l’amélioration de l’Internet local. Des législateurs aux techniciens travaillant avec le gouvernement territorial, en passant par les FSI, les consultants indépendants… partout où nous sommes allés, nous avons entendu : « Alors, que faisons-nous pour y arriver ? ».

Le PEI d’Iqaluit a tous les ingrédients d’une réussite. Au cours des prochains mois, nous travaillerons avec la communauté locale pour continuer à bâtir l’intérêt, sensibiliser et trouver des solutions aux problèmes techniques que nous rencontrerons. Pendant ce temps, la Nuvujaq Society travaillera fort afin de mettre en place son centre de données. Je ne suis pas un parieur et je sais mieux que de prévoir une date de lancement si tôt dans un projet complexe. Mais je soupçonne que 2019 sera une très bonne année pour l’Internet à Iqaluit.

À propos de l’auteur
Jacques Latour

En tant qu’expert de la conception de solutions de pointe en matière de TI, Jacques a établi CIRA à titre de leader mondial parmi les registres de domaines (ccTLD). Il possède plus de 25 ans d’expérience dans les secteurs privé et sans but lucratif et, à titre de dirigeant principal des technologies à CIRA, il dirige actuellement les Labos, plaque tournante de l’innovation à CIRA, et assure le leadership et la direction de la gestion et de la sécurité du registre .CA et de son DNS sous-jacent.

Visionnaire de la communauté d’Internet, Jacques a dirigé l’élaboration du test de performance Internet de CIRA, est un ardent défenseur de l’adoption de l’IPv6 et représente le registre .CA sur le plan international en qualité de membre de divers groupes de travail et groupes consultatifs. Il participe à l’élaboration d’une nouvelle architecture canadienne d’Internet. Il a agi comme catalyseur pour la création d’une association nationale canadienne des IXP, CA-IX, et il siège au conseil d’administration du Manitoba Internet Exchange (MBIX) et du DNS-OARC. Jacques siège aussi au comité consultatif pour la sécurité et la stabilité de l’ICANN.

Jacques est diplômé à titre de technologue en génie électronique après des études au Collègue Algonquin. Il a également suivi avec succès les formations certifiantes ITIL (v3) Foundation et Agile ScrumMaster.

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