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Gouvernance d’Internet : deux points de vue de l’équipe de l’ACEI

Compte tenu de la longue tradition d'engagement de l'ACEI au sein de la communauté mondiale de la gouvernance d'Internet, nous avons cru qu'il serait intéressant de s'entretenir avec Erin pour connaître la réaction d'une petite nouvelle au FGI et de la comparer à l'expérience d'Allan MacGillivray, qui y assiste depuis 2012.
Par Ryan Hill
Gestionnaire des communications

Compte tenu de la longue tradition d’engagement de l’ACEI au sein de la communauté mondiale de la gouvernance d’Internet, nous avons cru qu’il serait intéressant de s’entretenir avec Erin pour connaître la réaction d’une petite nouvelle au FGI et de la comparer à l’expérience d’Allan MacGillivray, qui y assiste depuis 2012.

Il y a quelques mois, Erin Hutchison, la nouvelle spécialiste des communications de l’ACEI, a assisté au Forum annuel sur la gouvernance d’Internet (FGI) tenu à Guadalajara, au Mexique, à titre de participante au programme  Jeunesse@IGF de la Société Internet. Nous avons cru qu’il serait intéressant de s’entretenir avec elle pour connaître la réaction d’une petite nouvelle au FGI et de la comparer à l’expérience d’Allan MacGillivray, qui y assiste depuis 2012.

Séance de questions et réponses avec Allan MacGillivray (à gauche), conseiller auprès du président et chef de la direction de l’ACEI, et Erin Hutchison, spécialiste des communications à l’ACEI.

À l’heure actuelle, la plupart des personnes qui intègrent le marché du travail au Canada sont des natifs du numérique, c’est-à-dire qu’elles ont grandi avec Internet et baignent dans la technologie au quotidien. Quelle incidence votre génération pourrait-elle avoir sur les priorités et les enjeux préoccupants relatifs à Internet? Un nouveau regard ou les années d’expérience changent-ils la façon d’envisager les questions émergentes en matière de gouvernance d’Internet? Et pourquoi le modèle multilatéral est-il un élément important du FGI?

Voyons ce qu’il en est.


Comment, chacun à votre façon, en êtes-vous arrivés à vous engager en matière de gouvernance d’Internet? 

Erin : J’ai tout d’abord été mise en contact avec la gouvernance d’Internet après mon entrée en poste à l’ACEI en mai 2016. Cela ne constituait qu’une mince partie de mes fonctions au sein de l’organisation, mais je savais que Byron et Allan étaient des joueurs de premier plan en cette matière et que l’ACEI était très engagée dans la communauté mondiale. Des délégués de l’ACEI assistent aux réunions de l’ICANN, d’autres prennent part aux processus de l’ONU et la crédibilité de l’ACEI est bien établie en ce qui concerne les questions complexes en matière de gouvernance d’Internet.

J’ai compris qu’il s’agissait d’un vaste domaine et que les sujets de préoccupation concernaient toutes les facettes, depuis la neutralité de la toile jusqu’à la cybersécurité.

Lorsque je suis entrée à l’ACEI (soit dès ma deuxième semaine!), j’ai assisté au Forum canadien sur l’Internet de 2016 à Ottawa. Cet événement canadien local fait partie des initiatives régionales et nationales du FGI. C’est là que j’ai pu voir à l’œuvre le modèle multilatéral et que j’ai commencé à comprendre la puissance de cette démarche pour aborder les enjeux importants auxquels fait face notre nation en ce qui concerne Internet.

Allan : L’ACEI appuie le FGI et y participe depuis longtemps. Byron anime souvent des discussions entre experts ou y participe et nous versons une contribution financière à l’événement. Lorsque je suis entré à l’ACEI en 2012, j’ai repris le dossier du FGI et j’ai commencé à prendre part à la coordination des activités de l’événement. 

Quelles ont été vos premières impressions du FGI?

Erin : J’ai été renversée par l’ampleur de l’événement. Il y avait plus de 2 000 participants possédant des expériences et des intérêts de toutes sortes, provenant de la communauté technique, de la société civile, des gouvernements et du monde universitaire. On trouve sur le site Web du FGI une représentation intéressante de la répartition des participants (en anglais) à l’événement.

Le programme Jeunesse@IGF nous a bien préparés en vue du FGI ainsi qu’à gérer nos attentes à cet égard. Grâce au cours en ligne offert au préalable, nous avons pu acquérir une compréhension approfondie des concepts de la gouvernance d’Internet, les appliquer aux questions qui nous concernent ici et en parler avec les autres participants au cours répartis aux quatre coins du monde. 

Allan : Le premier FGI auquel j’ai assisté a eu lieu à Bakou, en Azerbaïdjan, l’endroit (de loin) le plus inhabituel que j’avais eu le plaisir de visiter. Ce fut une expérience professionnelle incroyable, que je n’oublierai jamais.

J’ai été frappé par la diversité des participants et des points de vue. Il est toujours utile pour nous, des pays développés, d’entendre de vive voix les enjeux associés à Internet d’un point de vue mondial. 

L’ACEI est très axée sur le système de noms de domaine (DNS). Le fait de participer au FGI nous permet de changer de chapeau et de mieux comprendre le contexte mondial qui influe sur notre travail. De la neutralité de la toile à la cybersécurité, à la surveillance et au respect de la vie privée, en passant par la connexion du prochain milliard de citoyens du monde, les sujets abordés à l’occasion du FGI sont complexes, vastes et très importants pour l’orientation future d’Internet.

Parlez-nous un peu plus du modèle multilatéral.

Erin : Le modèle multilatéral a pour but de favoriser l’expression de divers points de vue et d’idées provenant de parties ayant des intérêts différents.

La grande variété des groupes de parties prenantes – société civile, gouvernements, communauté technique – présents a donné lieu à une discussion très animée. Plusieurs séances étaient axées sur l’accès Internet dans les pays en développement. Il est essentiel d’obtenir diverses perspectives à l’égard de la conception de solutions visant à améliorer l’accès à Internet. À l’occasion d’une des séances, les présentateurs ont donné des exemples de projets qui visaient à améliorer l’accès à Internet, mais qui avaient échoué faute de consultations auprès des groupes de parties prenantes au moment de concevoir la solution.

Au cours de l’événement, une attention particulière a aussi été accordée aux préoccupations des jeunes. Notre génération sera celle qui façonnera les politiques relatives à Internet, devra gérer les répercussions sociales de l’accès à Internet, de la cybersécurité, de l’emploi dans un marché du travail numérique, etc. Je crois qu’actuellement, la gouvernance d’Internet ne constitue pas une préoccupation évidente pour les jeunes et c’est pourquoi il faut que ce groupe soit représenté en plus grand nombre.

Le programme Jeunesse@IGF attire des jeunes à l’événement, mais ces personnes ne doivent pas qu’y faire acte de présence. Elles doivent y participer pleinement et acquérir des connaissances et la capacité de s’engager pleinement à l’égard de ces questions. Il peut être intimidant de se lever et d’émettre un commentaire ou de poser des questions lorsqu’on est la personne la plus jeune de l’auditoire. Les jeunes ont bien participé pendant l’événement, mais de l’opinion générale, nous nous sommes sentis en marge pendant la semaine, c’est-à-dire que nous n’avions pas voix au chapitre à l’égard des décisions importantes. J’espère que cet aspect pourra s’améliorer davantage à l’occasion des prochains FGI.

Allan : Honnêtement, j’en apprends plus chaque année au sujet des processus du FGI et de la façon dont ils ont évolué. Je crois que c’est l’une des valeurs ajoutées de l’événement. Il comporte des activités visant à intégrer les nouveaux arrivants au programme, mais il s’agit d’une communauté à laquelle on peut certainement apprendre à participer.

Je suis tout à fait d’accord avec Erin en ce qui concerne la participation des jeunes et je peux affirmer qu’il y a eu une nette amélioration à ce chapitre au FGI. La présence des jeunes était visible et a été, selon moi, utile. Le programme Jeunesse@IGF contribue à attirer des jeunes aux activités tout en veillant à leur permettre de participer aux discussions.

Je crois que le modèle multilatéral contribue à assurer la diversité au FGI. L’auditoire est diversifié à la fois sur le plan politique et sur le plan culturel, ce qui est inestimable pour la discussion; cela la rend aussi beaucoup plus intéressante. Les communautés diversifiées ne disposent pas toujours de moyens leur permettant de développer des liens structurés et informels. Cela représente pour moi un apport important du FGI.

Quels ont été vos séances et vos moments préférés?

Erin : La séance intitulée Teaching Internet Governance (enseigner la gouvernance d’Internet) se penchait sur les dix ans du projet Schools on Internet Governance (SIG). J’ai été étonnée de voir le grand nombre d’occasions offertes de s’engager dans ce travail à l’échelle mondiale. J’en ai conclu que bien qu’il s’agisse d’un sujet spécialisé que des gens ont étudié en profondeur, il y aurait lieu de faire davantage pour informer le grand public (en particulier les jeunes) au sujet de la gouvernance d’Internet.

J’ai aussi beaucoup aimé la séance intitulée Digital Economy and the Future of Work  (l’économie numérique et l’avenir du travail). Faisant partie d’une tranche de population plus jeune, je me rends compte de plus en plus que notre système d’éducation pourrait faire davantage pour nous offrir un enseignement au sujet de la technologie afin de nous préparer à concurrencer dans une économie moderne. Ce n’est pas un sujet qui fait partie de mes préoccupations courantes à l’ACEI, mais plutôt d’un intérêt personnel et j’ai bien aimé obtenir un point de vue mondial sur cette question.

La rencontre des autres jeunes a vraiment été un autre des faits saillants de la semaine. Il y avait des étudiants qui travaillaient à des recherches sur la transition de l’IANA, des gens qui travaillaient sur des projets liés aux nouveaux gTLD, une personne chargée de la coordination d’une initiative nationale et régionale dans son pays et des personnes travaillant dans le domaine du développement. J’ai beaucoup appris de mes discussions avec les membres de ce groupe formidable.

J’avais aussi fait un échange étudiant dans une université de Guadalajara, et j’étais  heureuse de revenir dans une ville familière et de goûter de nouveau à la culture mexicaine.

 

Un spectacle de mariachis lors de la cérémonie d’ouverture du FGI 2016

Allan : À la suite de certaines critiques reprochant au FGI de ne pas déboucher sur du concret autant qu’il le pourrait, on a pris des mesures pour prévoir des séances pratiques permettant aux participants de rapporter de l’information à leur organisation nationale ou régionale. Cette année, le forum comportait des séances portant sur le sexe et l’accès, la sécurité et les IXP. J’ai parlé brièvement de l’expérience canadienne concernant les IXP à l’occasion de cette discussion entre experts qui a été, selon moi, intéressante.

Il était question plus précisément des opérations et de la gestion relatives aux IXP, un élément qui, selon moi, est souvent négligé lorsque les discussions prennent une orientation plus technique. Même si la technologie est là, si on n’est pas prêt à l’exploiter sur le terrain, les choses peuvent devenir difficiles. L’ACEI est d’avis que son rôle n’est pas de dicter aux autres ce qu’ils devraient faire. Nous pouvons cependant parler de notre expérience du domaine au Canada et répondre aux questions concernant les façons de faire qui, selon nous, ont bien réussi. J’espère que d’autres pourront tirer profit de notre expérience, si ce n’est que d’apprendre de nos erreurs et de nos faux-pas.

Au cours de l’événement, les thèmes portant sur la cybersécurité se sont révélés marquants. C’est la tribune idéale pour tenir ces discussions, alors qu’on profite de la présence de représentants techniques de l’IAB, de l’IEEE et autres, qui sont en mesure d’engager un dialogue avec des responsables des politiques et des représentants de la société civile en cette matière. Je me suis beaucoup intéressé au contenu relatif à Internet des objets au FGI cette année. Internet des objets préoccupe de plus en plus les experts de la sécurité, tout en représentant une occasion d’affaires et de développement immense.


Le modèle multilatéral adopté au FGI est essentiel; il permet d’assurer une représentation exhaustive, soit sur le plan géographique (par pays), démographique (par âge et sexe) et sur le plan des groupes de parties prenantes (société civile, communauté technique, etc.) au moment de discuter des solutions aux questions de gouvernance d’Internet. Des représentants de chaque groupe de parties prenantes ont l’occasion de communiquer leur expérience et leur opinion dans le cadre de discussions entre experts, de tables rondes ou simplement en faisant connaissance dans les couloirs entre les séances.

Depuis les vétérans de l’industrie qui ont assisté à l’évolution des technologies au fils des ans jusqu’aux jeunes n’ayant jamais vécu sans Internet, chacun peut apporter au FGI et en tirer profit à sa façon.

À propos de l’auteur
Ryan Hill

Ryan Saxby Hill est un expert des communications et du marketing numérique. De 2014 à 2017, il a agi à titre de gestionnaire des communications à l’ACEI. Auparavant, Ryan orchestrait les relations avec les médias et les activités de mobilisation en ligne de la Fondation canadienne pour l’innovation. Il a aussi occupé des postes où il gérait les communications et les programmes de RP mondiaux au service de Ciena Corporation et de Nortel Networks.

De plus, il a fondé Apartment613, un organisme primée des médias de la communauté numérique basée à Ottawa et siège au conseil d’administration de Centretown Citizens Ottawa Corporation, l’un des fournisseurs de logement sans but lucratif les plus innovants.

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