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Les défenseur·euses de la jeunesse bénéficiaires d’une subvention par CIRA sont prêt·es à exercer leur influence sur la législation concernant les préjudices en ligne

À une époque où les personnes, en particulier les jeunes, sont chroniquement en ligne, les politiques de sécurité en ligne sont plus importantes que jamais. Nous avons rencontré l’ancien bénéficiaire de la subvention Net Good, le Centre pour les médias, la technologie et la démocratie à l'Université McGill, pour savoir comment leur contribution permet de bâtir un Internet fiable au Canada.
Par Caitlin Sears
Coordinatrice des subventions

Des appareils Chromebook en classe en passant par le partage de contenu avec des amis sur TikTok jusqu’aux jeux vidéo en continu sur Twitch, les enfants du Canada ont aujourd’hui un accès sans précédent à l’information, au divertissement et aux interactions sociales en ligne. Pourtant, l’Internet comporte des risques importants. Lorsque des chercheur·euses du Centre pour les médias, la technologie et la démocratie à l’Université McGill ont demandé une subvention Net Good de CIRA en 2022, le gouvernement fédéral a présenté le projet de loi C-63, une nouvelle Loi sur les préjudices en ligne visant à assurer la sécurité des enfants en ligne, en mettant l’accent sur la détermination de la façon d’associer les jeunes dans les politiques qui les concernent.

Le Centre pour les médias, la technologie et la démocratie est un centre de recherche interdisciplinaire qui se consacre à l’étude des défis sociaux, politiques et stratégiques que présentent notre écosystème d’information et nos technologies numériques en évolution. Ce dernier travaille également à la recherche de solutions pour répondre à ces défis. « Nous voulons réaliser des projets universitaires non conventionnels qui intègrent pleinement l’engagement et la participation du public dès la conception du projet et non après coup », explique Taylor Owen, titulaire de la Chaire Beaverbrook en médias, éthique et communications, directeur du Centre et professeur agrégé à l’École de politiques publiques Max Bell de l’Université McGill.

La recherche du Centre a révélé que la plupart des jeunes au Canada ont vu de la haine sur leurs fils d’actualité des médias sociaux et ont subi les effets de la désinformation au sein de leurs communautés. Bien que le projet de loi C-63 ait un impact significatif sur la façon dont les enfants utilisent et comprennent ces plateformes en ligne, Taylor, ainsi que Helen Hayes, directrice de la recherche du Centre et doctorante à l’Université McGill, ont constaté que les enfants étaient exclu·es de la discussion nationale sur la protection des enfants en ligne.

« La façon d’assurer les droits des enfants sur Internet, par le biais de la réglementation fédérale, fera l’objet d’un débat important au pays au cours de la prochaine année, et ces dernier·ères devraient faire partie de ce débat », déclare Taylor. « Cette occasion leur permettra de s’engager activement et de se faire entendre avec force. »

Avec le soutien de CIRA, l’Assemblée jeunesse sur les droits numériques et la sécurité a été un événement révolutionnaire de quatre jours organisé en juin dernier au Musée canadien pour les droits de la personne à Winnipeg. Plus de 35 jeunes de partout au Canada ont collaboré avec des expert·es universitaires et des décideur·euses pour rendre les espaces en ligne plus sécuritaires pour les jeunes et les générations futures. L’objectif était de parvenir à un consensus sur une série de recommandations pour les décideur·euses, les plateformes en ligne et la société civile canadienne en général.

L’Assemblée jeunesse s’inspirait du modèle de l’assemblée des citoyen·nes, qui a été utilisé partout au Canada et en Europe pour fournir des conseils détaillés aux gouvernements et aux décideur·euses concernant les politiques publiques. Helen et les organisateur·rices de l’Assemblée jeunesse ont recruté des participant·es de 18 ans sur leur site Web et en communiquant avec un réseau d’enseignant·es, d’organismes communautaires et de milliers de conseils scolaires. Les membres ont été sélectionné·es par tirage au sort afin de garantir la plus grande diversité possible, y compris la parité des sexes et la représentation de l’ensemble du Canada, dont 20 membres identifié·es comme faisant partie d’un groupe racialisé.

« Ces jeunes personnes âgées de 18 ans venaient tout juste de vivre l’expérience de l’enseignement secondaire sur Internet, et elles se trouvaient à un stade tellement intéressant de leur vie », explique Helen. « Cela a vraiment façonné leur passion pour ce projet parce qu’elles n’étaient pas satisfaites de leurs expériences Internet. »

L’Assemblée jeunesse a été une première au Canada. Comparativement aux autres assemblées des citoyen·nes avec des adultes, qui se déroulent normalement sur plusieurs mois, Taylor note que les membres de l’Assemblée jeunesse ont eu beaucoup moins de croyances préconçues les uns sur les autres ainsi que sur les sujets politiques et les politiques. « Cela leur a permis d’être intégrés à ce processus hautement immersif et de se réunir rapidement. Il faut plus de temps aux adultes pour surmonter les notions préconçues. »

Le programme a été élaboré en collaboration avec un conseil consultatif et un grand nombre d’expert·es, d’organisations de la société civile et d’universitaires afin de couvrir les domaines clés des débats sur la sécurité en ligne. Le programme ne partait pas du principe que chacun avait des connaissances professionnelles préalables; il garantissait que l’ensemble des membres partaient sur un pied d’égalité. Le programme a abordé des sujets allant de l’indigénéité dans la technologie à l’économie des enfants, en passant par des questions sur les droits numériques et ce que signifie avoir de l’autonomie en ligne.

Certains membres ont dû sacrifier leur bal des finissant·es, reporter leurs dates examens d’études finales ou suivre en direct les cérémonies de remise des diplômes du secondaire pour pouvoir assister à l’Assemblée jeunesse. Cependant, même en ratant ces moments marquants, leur niveau d’enthousiasme et d’engagement a largement dépassé les attentes de toutes et de tous.

Les membres ont appris des conférencier·ères invité·es, ont participé à des séances de questions et réponses ainsi qu’à des discussions sur leurs plus grandes préoccupations et leurs plus grands défis. Les membres ont suivi les discours de plus d’une douzaine de conférencier·ères, dont Frances Haugen, une dénonciatrice Facebook et une défenseuse de la transparence et de la responsabilité dans les médias sociaux; Maude Bonenfant, titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur les communautés de jeu et les mégadonnées, qui s’est adressée aux membres sur la façon dont leurs données sont recueillies par les entreprises de jeux en ligne; et Riley Yesno, un érudit anishinaabe, auteur et commentateur de la Première Nation Eabametoong, qui a parlé des inégalités d’accès à la technologie et des préoccupations relatives à la souveraineté des données rencontrées par les communautés indigènes.

« Les membres ont posé des questions incroyablement significatives et étaient tellement prêt·es à parler de ces problèmes et à essayer de trouver des solutions », affirme Helen. « C’était vraiment incroyable de les voir se réunir, travailler sur ces questions très urgentes et avoir des conversations significatives. » Malgré les journées chargées, jusque tard dans la nuit, dans les couloirs de leur hôtel, les membres continuaient à échanger sur les questions abordées au cours de la journée.

Le dernier jour de l’Assemblée jeunesse, les membres ont travaillé avec des animateur·rices en petits groupes pour formuler des recommandations de politiques. Les membres se sont ensuite rassemblé·es une nouvelle fois pour parachever leur travail. « Il y avait un fort engagement de la part de toutes et de tous et plusieurs recommandations remarquables ont été ainsi formulées, en adéquation avec les revendications des organisations de la société civile, des universitaires et des expert·es en matière de sécurité en ligne », explique Helen. Les recommandations ont été faites en réponse à huit questions que les membres ont identifiées comme étant les plus cruciales :

  • Manque de surveillance et de pratiques d’exploitation
  • Manque de transparence
  • Diminuer le bien-être
  • Sous-représentation des jeunes dans la politique et la prise de décisions en ligne
  • Abondance de renseignements de faible qualité
  • Manque de contrôle des utilisateurs et protection de la vie privée
  • Oppression des communautés méritant l’équité
  • Éducation insuffisante à la littératie numérique

Pour clore l’Assemblée, les membres ont eu l’occasion de présenter leurs recommandations aux intervenant·es clés, y compris les représentant·es du Commissariat à la protection de la vie privée du Canada, du Bureau du ministre de la Sécurité publique, du Bureau du ministre de l’Innovation, des Sciences et du Développement économique (ISDE), de la sénatrice Marilou McPhedran et d’autres organisations de la société civile. L’ensemble des participant·es ont reçu un certificat de service public en reconnaissance de son travail acharné et de ses contributions. La sénatrice McPhedran a été tellement impressionnée par les conclusions du groupe qu’elle a offert des stages dans son bureau à chaque membre!

À la suite de l’Assemblée jeunesse, le Centre a publié son rapport historique sur les recommandations des membres, 2023 Youth Assembly on Digital Rights and Safety: Recommendations to promote the safety, well-being and flourishing of Canadian youth online [en anglais]. Le plus notable a été leur appel à un engagement accru des jeunes dans les processus d’élaboration de politiques, tant au sein du gouvernement que du secteur numérique privé.

Le rapport a été partagé avec les décideur·euses et les politicien·nes des bureaux provinciaux et fédéraux pertinents, y compris l’ISDE, le Patrimoine canadien et le Commissariat à la protection de la vie privée du Canada. Il a également été partagé avec les abonnés au bulletin du Centre, sur leurs réseaux sociaux et avec les contacts des médias canadiens.

Bien que l’Assemblée jeunesse soit terminée, l’intérêt pour participer au débat public sur la sécurité en ligne persiste. Taylor et Helen veulent donner aux membres les outils nécessaires. « Nous voulons amplifier le rapport et leurs voix, collectivement et individuellement, mais aussi les aider avec l’infrastructure dont ils/elles pourraient avoir besoin pour coordonner plus activement et jouer un rôle continu », soutient Taylor.

Afin de soutenir leur travail continu lié à la Loi sur les préjudices en ligne, Taylor et Helen comptent continuer à mobiliser un réseau de jeunes au Centre. En fait, bon nombre des recommandations du rapport pour les jeunes sont évidentes dans la Loi, y compris les appels à la « transparence des entreprises de médias sociaux en ce qui concerne les préjudices causés par leurs produits, leurs algorithmes et leurs pratiques de collecte, de distribution et d’utilisation des données ».

Helen croit que l’Assemblée jeunesse a connu un tel succès, car des liens se sont formés rapidement entre les membres dès leurs premières interactions. « Cela s’est traduit par l’élaboration de recommandations incroyables, mais aussi par une excellente collaboration, une coalition et des amitiés durables entre les participant·es. Je pense que cela permettra à ces jeunes de participer à davantage de ces processus de démocratie délibérative à l’avenir. »

Vous souhaitez faire un excellent travail comme celui du dernier bénéficiaire de la subvention? L’appel annuel de CIRA pour soumettre vos demandes de subventions dans le cadre du programme Net Good est maintenant lancé. Si vous avez une idée pour un projet Internet communautaire qui profite aux communautés nordiques, rurales ou autochtones ou aux étudiant·es, faites votre demande d’ici le 10 avril à 14 h HE.

À propos de l’auteur
Caitlin Sears

Caitlin fait partie de l’équipe Net Good de CIRA en tant que coordinatrice des subventions. Elle a travaillé dans le secteur caritatif et se passionne pour le financement de l’équité numérique.

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